Lea Hourcade - Rédactrice web

L’euthanasie a été dépénalisée en Belgique le 28 mai 2002. Soumise à des conditions strictes, les médecins et le personnel médical souhaitant la pratiquer doivent avoir suivi une formation particulière. D’ailleurs, il existe des dispositions législatives sévères qui règlementent son exercice.  Pouvant donner lieu à des abus, le droit à l’euthanasie est depuis toujours un sujet de polémique dans de nombreux pays, particulièrement en Belgique.

Ainsi, si vous êtes confronté ou avez un proche faisant face à une telle situation, l’idéal est de solliciter l’avis d’un avocat de fin de vie. Ce professionnel est en mesure de soutenir un patient en cas d’incapacité d’exprimer ses souhaits. Il prendra également en charge la rédaction des directives anticipées et la désignation d’une personne de confiance pour assister le patient. Si un de vos proches a fait l’objet d’une euthanasie sans son consentement, l’avocat de fin de vie vous soutiendra dans toutes les procédures judiciaires nécessaires et défendra votre cause devant le tribunal compétent.

euthanasie belgique

Selon une analyse effectuée par la Commission, environ 2 655 cas d’euthanasie ont été déclarés entre le 1er janvier 2019 et le 31 décembre 2019. D’après ce chiffre, une hausse de 12,5 % du nombre d’euthanasies enregistrées par rapport à l’année 2018 a été constatée. Afin de mieux comprendre ce phénomène, voici ce qu’il est important de retenir à ce sujet.

Qu’est-ce que le droit à l’euthanasie ?

L’euthanasie est un acte par lequel une personne, le patient, demande à un tiers, le professionnel de la santé, de mettre fin à sa vie intentionnellement, avec son consentement. En Belgique, le droit à l’euthanasie autorise un patient à se donner la mort volontairement via une injection de produits anesthésiants. Il s’agit d’une situation délicate qui engage la responsabilité professionnelle et juridique du médecin. Bien qu’étant plus ou moins reconnue, cette pratique requiert d’innombrables procédures à respecter. Selon les statistiques en matière de déclarations d’euthanasie durant l’année 2019, 67 ,8 % des patients seraient âgés de plus de 70 ans et 39,3 % de plus de 80 ans. Ce pourcentage est relativement bas, soit 1,5 % seulement, pour les personnes âgées de moins de 40 ans. Dans la majorité des cas, 76,3 % des patients demandant l’euthanasie se trouvent entre la tranche d’âge de 60 et 80 ans. Quant au lieu de sa pratique, environ 43,8 % des euthanasies ont eu lieu au domicile des patients. Pour les interventions pratiquées dans les hôpitaux, le pourcentage est évalué à 38,2 %. D’ailleurs, 15,9 % des cas se font dans les maisons de repos et de soins. Ces analyses prouvent que le droit à l’euthanasie est très répandu dans l’État belge. Toutefois, les conditions de son exercice soulèvent de nombreuses questions du point de vue médical, social et surtout législatif.

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La loi du 28 mai 2002

Dès l’adoption de cette loi, le gouvernement belge a autorisé la dépénalisation de l’euthanasie. Cela signifie que cette pratique n’est plus considérée comme un crime. Il ne s’agit toutefois pas d’un droit reconnu au malade tout comme l’euthanasie n’est pas exigible d’un médecin à un autre.

La loi exonère de toute responsabilité le médecin qualifié en la matière qui met intentionnellement fin à la vie d’une personne à la demande de cette dernière.

Cependant, la pratique du droit à l’euthanasie doit respecter certaines conditions, à savoir :

  • Le patient doit être majeur ou mineur émancipé, capable d’exprimer sa volonté. Pour ce faire, il doit rédiger une demande écrite à son nom. Depuis la loi du 28 février 2014, la procédure est désormais ouverte aux mineurs, mais sous certaines conditions.
  • Le médecin doit vérifier que le patient n’est soumis à aucune pression extérieure et qu’il a pris sa décision de manière réfléchie.
  • Le patient doit souffrir d’une pathologie incurable, sa souffrance physique et psychologique doit être insupportable, constante et inapaisable.
  • Le médecin doit consulter un deuxième médecin, qui vérifiera que toutes les conditions sont correctement remplies. Si le patient n’est pas en phase terminale, l’avis d’un troisième médecin, spécialiste de la pathologie du client, sera obligatoire. Un délai de 1  mois devra être respecté.
  • Seul un médecin peut réaliser l’euthanasie. À l’issue de la procédure, il devra remplir un formulaire et devra le déposer, sous 4 jours, à la Commission fédérale de contrôle et d’évaluation de l’euthanasie.

Les médecins ne souhaitant pas réaliser d’euthanasie peuvent invoquer une clause de conscience. Cette clause découle de la loi belge du 28 mai 2002 énonçant « qu’aucun médecin n’est tenu de pratiquer une euthanasie » et également « qu’il est tenu, à la demande du patient ou de la personne de confiance, de communiquer le dossier médical du patient au médecin désigné par ce dernier ou par la personne de confiance ». En invoquant ce principe, le médecin peut refuser de mettre fin à la vie d’un patient. En outre, une obligation déontologique de renvoi vers un autre médecin intervient, c’est-à-dire que le médecin concerné et qui refuse l’euthanasie communique le dossier à un autre praticien.

À noter :

Le Conseil de l’Ordre des médecins belge a évoqué un avis le 6 mai 2017 concernant l’obligation déontologique du médecin vis-à-vis du patient. Ladite disposition vise à informer le patient et à le « diriger vers une structure médicale susceptible de le prendre en charge » afin de répondre à sa demande. Toutefois, cette affirmation prend le contre-pied de la loi au sujet de l’objection de conscience.

Le droit à l’euthanasie chez les mineurs

La Belgique est le seul pays au monde à permettre l’euthanasie sur les mineurs. Aucune condition d’âge n’est exigée, il faut seulement que l’enfant ait une capacité de discernement. De même, il doit souffrir d’une maladie physique constante, inapaisable et insupportable, entraînant son décès à brève échéance. Cela signifie que le patient mineur doit être motivé par les bonnes raisons d’en finir avec sa vie. Avant de pouvoir être euthanasié, il devra se rendre chez le pédopsychiatre ou le psychologue. Enfin, il faudra que ses représentants légaux donnent leur accord (généralement par écrit). À ce sujet, les représentants légaux sont les personnes reconnues devant la loi pour agir au nom du mineur dans toutes affaires délicates.

Qui s’occupe de vérifier que les médecins appliquent bien la procédure ?

Le rôle de la Commission de contrôle et d’évaluation de l’euthanasie est de vérifier que le médecin qui a pratiqué l’euthanasie l’a fait dans les conditions préétablies par la loi.

Cette entité est composée de 16 membres effectifs désignés par arrêté royal et 16 membres suppléants. Parmi eux se trouvent 8 médecins, 4 professeurs de droit et 4 spécialistes de la problématique des maladies incurables. Ils sont nommés pour 4 ans et doivent respecter une parité linguistique, c’est-à-dire doivent maîtriser et parler 2 langues en même temps. Cette règle vise à faciliter la communication et le mode d’organisation.

La Commission examine 1 fois par mois les dossiers remis par les médecins ayant pratiqué l’euthanasie.

Par ailleurs, la Commission envoie des rapports tous les 2 ans aux chambres législatives au sujet de certaines informations, à savoir :

  • les statistiques établies à partir des dossiers remis par les médecins ;
  • une description et une évaluation de l’application de la loi ;
  • si nécessaire, une recommandation susceptible de modifier la loi.

Comment se pratique l’euthanasie ?

L’euthanasie est une procédure qui peut prendre du temps. Les démarches à suivre peuvent demander plusieurs mois, parfois même des années. Les médecins doivent en effet effectuer un suivi régulier du patient pour être certains que la décision ne se fait pas sur un coup de tête. Par ailleurs, toutes les solutions médicales doivent avoir été épuisées avant d’avoir recours à l’euthanasie. Sur ce point, d’après les chiffres évoqués durant l’année 2019 en Belgique, 83,1 % des décès suite à une euthanasie étaient prévus à brève échéance. Dans la majorité des cas, 82,8 % des patients ayant eu recours à cette pratique l’ont fait pour des causes de souffrances physiques et psychiques. Il s’agissait en effet de maladies graves et incurables. Outre cela, 1 % des cas d’euthanasie concernent des patients inconscients qui ont fait une déclaration anticipée bien avant de mourir.

De manière détaillée, les maladies entraînant la décision d’euthanasie chez les patients étaient nombreuses telles que :

  • les tumeurs ou des cancers à 62,5 % ;
  • les polypathologies à 17,3 % ;
  • les maladies du système nerveux à 8,7 % ;
  • les maladies de l’appareil circulatoire à 3,4 % ;
  • les maladies de l’appareil respiratoire à 3,2 % ;
  • les troubles mentaux et du comportement à 1,8 %.

Les seuls médecins habilités à pratiquer l’euthanasie sont ceux qui ont suivi la formation EOL (End Of Life – Fin de vie). Il s’agit d’une formation destinée aux médecins, aux psychologues et aux infirmiers qui consiste à suivre les démarches relatives à l’euthanasie.

L’euthanasie se fait principalement par une injection de produits anesthésiants effectuée par le médecin sur le patient. Il est possible de la pratiquer à l’hôpital ou à domicile. Pour ce faire, des kits d’euthanasie sont accessibles à la pharmacie, et seul un médecin est habilité à s’en procurer un. Ce dernier prend en charge le surplus de produits et s’assure ensuite de la dose à administrer.

Les arguments en faveur de l’euthanasie

Dès les années 1970, les revendications ou les réclamations du droit à l’euthanasie ont commencé à prendre de l’ampleur. L’acharnement thérapeutique est alors fréquemment dénoncé et en 1982, l’ADMD (Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité) est créée. Sa devise ? “Choisir sa mort : une liberté ! un droit !” . Cet argument devient finalement le principal argument avancé par les pro euthanasie, c’est-à-dire le pouvoir de maîtriser sa mort. Il s’agit en fait d’humaniser le patient et de lui reconnaître une autonomie ainsi qu’ une possibilité de choisir son sort.

Le patient peut alors décider de mettre fin à ses souffrances tant physiques que psychologiques et dire non à l’acharnement thérapeutique. Il reste libre de son choix jusqu’à l’achèvement de la procédure, puisqu’il peut se rétracter au dernier moment s’il le souhaite. L’histoire de Laura Emily, une jeune femme de 24 ans qui souffrait de dépression en témoigne. Au dernier moment, elle a interrompu la procédure, estimant que les quelques semaines passées avant sa mort avaient été supportables. En revanche, d’autres ont choisi de mettre fin à leurs souffrances, comme le cas de Christian de Duve, ancien Prix Nobel, qui, atteint d’un cancer à l’âge de 95 ans, a décidé de mettre fin à sa vie sans rétractation ou sans changer de décision.

Dérives et polémiques

De nombreuses dérives ont été constatées en Belgique. Ainsi, il est reproché à la Commission de contrôle et d’évaluation de l’euthanasie de ne pas toujours vérifier correctement les dossiers transmis. Dans les 10 premières années qui ont suivi la dépénalisation, aucun dossier n’a été communiqué à la justice. De plus, la Commission a déclaré « ne pas avoir la possibilité d’évaluer la proportion du nombre d’euthanasies déclarées par rapport au nombre d’euthanasies réellement pratiquées ». Il a également été affirmé qu’une multitude de cas d’euthanasies dites douteuses se pratiquent encore clandestinement.

D’ailleurs, la loi belge demeure assez laxiste dans l’interprétation des termes “souffrance psychologique et physique intolérable”. La notion de souffrance reste subjective, c’est-à-dire qu’elle dépend de la situation et de la personne en question. À titre d’exemple, une femme anorexique de 44 ans et abusée sexuellement pendant des années par son psychiatre a pu être euthanasiée. Elle disait avoir « un cancer dans la tête ». Les médecins ont donc considéré que sa souffrance était telle que cela lui donnait le droit de bénéficier de l’euthanasie.

L’euthanasie est aussi parfois qualifiée de “suicide assisté” par ses détracteurs. Ce terme s’explique par le fait que les malades planifient leur mort. Cela a été le cas pour Kevin Chalmet, un trentenaire atteint d’une tumeur au cerveau. Il a décidé de réunir ses proches autour de lui, de « manger une couque au beurre » et est, avant cela, passé saluer ses collègues.

Bon à savoir :

Certains médecins et spécialistes craignent aussi les euthanasie économiques. Il s’agit du fait d’euthanasier des patients atteints de la maladie d’Alzheimer ou de maladies incurables afin de rebasculer l’argent qui aurait dû servir aux soins vers des pathologies curables. L’Institut Européen de Bioéthique constate que dans la plupart des cas « soit le professionnel de la santé refuse la demande du patient et le renvoie vers un médecin ou une structure défavorable à l’euthanasie, et le patient souhaitant la pratiquer ne pourra pas l’exercer, soit il le renvoie vers une structure ou un médecin qui y est favorable et l’euthanasie a lieu sans objection de conscience ».

Au niveau international, la Belgique reste le pays le plus ouvert à l’euthanasie. Toutefois, l’opinion belge s’est habituée à l’euthanasie, qu’elle considère comme un droit dont on peut user et parfois même abuser, d’où la complication de cette pratique. En effet, le nombre d’euthanasies clandestines ne cesse d’accroître et le non-respect des dispositions de la loi du 28 mai 2002 est souvent constaté.

 

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